Star de la cuisine collective, Franck Frumholz a accepté de se prêter au jeu de l’interview avec l’Ecole des Pros. Il revient pour nous sur son parcours et nous donne sa vision de la cuisine de collectivité. Ses objectifs ? Transmettre le goût, travailler des produits locaux, limiter le gâchis alimentaire… et porter un nouveau regard sur la cuisine collective.
Bonjour Franck, quel est votre parcours ?
J’ai étudié au Lycée Simon Lazard à Sarreguemines pendant 4 ans, avec à la clé un BEP / CAP cuisine et un BAC PRO restauration.
Suite à l’obtention de mes diplômes, je suis parti faire des saisons. J’ai commencé par travailler dans les Alpes en hiver, au restaurant d’altitude La folie douce, composé d’un côté d’un self service et de l’autre d’un restaurant avec un service à l’assiette. Je suis ensuite allé dans le sud à cap Esterel, dans un restaurant gastronomique, où j’ai exercé en tant que cuisinier la première année. Les saisons suivantes, j’ai travaillé en tant que second de cuisine, puis je suis devenu chef cuisinier.
Ensuite, pour me perfectionner, je suis passé brièvement dans des restaurants atypiques d’Alsace et des environs de Lyon.
Ayant un penchant pour la cuisine collective de qualité choisie, j’ai décidé d’intégrer l’enseigne Sodexho pendant une année pour y apprendre une gestion plus millimétrée et préparer le concours d’entrée dans la fonction publique. C’est désormais chose faite : j’ai intégré le ministère de la Défense.
En 2002, j’ai commencé en tant que cuisinier à Bitche pour terminer chef de cuisine de la base de défense de Phalsbourg, en 2011.
En septembre 2011, pour des raisons personnelles et géographiques, j’ai accepté un poste de chef s’étant libéré à quelques kilomètres de ma résidence, dans le département de la Moselle.
Au jour d’aujourd’hui, je suis chef du restaurant scolaire du collège jean Jacques Kieffer de Bitche.
Pourquoi avoir choisi de travailler dans la cuisine collective et non dans un restaurant/bistrot ? Quelles étaient vos motivations ?
Il y a différentes raisons quant à mon choix d’être chef dans une cuisine collective.
Tout d’abord pour des raisons familiales, les horaires réguliers sans coupures, le fait de ne pas travailler le week-end et les jours fériés, ce qui ne m’empêche pas de m’éclater avec mon métier.
Ensuite pour l’avancement au sein de la collectivité, ces avantages (CE, etc.) et une carrière au sein de la collectivité avec des responsabilités certes, mais moindres par rapport au privé.
Pourriez vous nous expliquer en quoi consiste votre démarche locale et biologique ?
Le domaine du métier de chef de cuisine en milieu scolaire est vaste selon l’engagement professionnel de la personne. Certes, il existe des chefs qui se contentent des protocoles de bases, mais on peut très bien s’éclater, faire du bon manger et avoir une bonne réputation dans le domaine de la cuisine collective !
En tant que chef dans un collège, j’estime que l’apprentissage du goût fait partie de ma mission. L’éveil des papilles, la découverte du patrimoine culinaire, de l’identité paysagère de notre région et le développement durable aussi.
Pensez-vous aussi que manger sainement est important ? Avons-nous le temps et le budget pour manger BIO à la maison ? Prenons-nous le temps le soir de faire à manger après une longue journée de travail, nous les parents, à nos enfants ? C’est pour ces raisons que ma démarche locale et durable prend toute son ampleur .
Quelle satisfaction en tirez vous au quotidien ?
Ma principale satisfaction est le sourire des enfants à la fin du service. Je suis fier de ma cuisine et je dors tranquille la nuit…
Peut-on tenir son budget, en tant que chef d’une cuisine collective, en cuisinant des produits locaux et biologiques ?
Alors OUI c’est possible. C’est par contre très compliqué !
Je ne vais pas entrer complètement dans les détails, mais la mise en oeuvre est longue et millimétrée. Chaque centime de gagné est réinjecté dans l’assiette. Lutter contre le gaspillage, le contact et les tarifs avec les producteurs, la formation de l’équipe, le matériel adéquate, l’optimisation du temps de travail et la gestion des stocks a vraiment un sens.
D’où vous vient cet engagement ?
J’ai grandi dans le jardin de ma mère, je l’aidais à cultiver son jardin et allait y piquer des petits pois juste avant de passer à table… mais quel bonheur ! Du coup, ça m’est toujours resté.
Dans un deuxième temps, le département de la Moselle a proposé une charte allant dans le même sens et correspondant à ce que nous faisions déjà.
Comment avez vous convaincu vos employeurs d’aller plus loin dans la démarche bio : produit d’entretien bio, jardin potager bio, verger bio, composteur ?
J’ai tout simplement profité de la semaine européenne de la réduction des déchets en 2014 pour emmener tout le monde dans ce sens.
Un matin, le principal m’a charrié : « Mr Frumholz, vous n’avez pas encore fait de concours cette année ! ». Je lui ai alors répondu « Ok , c’est parti pour la SERD, si je gagne, on se fera un repas ! ».
J’ai simplement décidé de mettre sur papier et d’informer ce que nous faisons au quotidien. Les professeurs et l’administration ont été immédiatement impliqués.
Et si l’on créait une économie circulaire ? Nous avons mis en place un composteur construit par les élèves de SEGPA. Fini les machines pour éplucher ! Nous sommes passé au recyclage du papier, à la mise en place de produits avec un impact moindre sur l’environnement et à une profusion de produits locaux. Les produits préemballés, c’est fini pour de bon !
Les déchets verts sont mis au compost, puis au jardin pédagogique. Nous récoltons quelques légumes qui se retrouvent dans l’assiette du collégien : la boucle est bouclée !
Aujourd’hui, nous n’avons plus le droit de distribuer les légumes au collège à cause de l’échinococcose suite au passage du service vétérinaire. Je trouve ça absurde mais bon, les règles d’hygiènes sont à respecter à la lettre.
En pratique, cela est-il plus contraignant ?
Oui, plus de travail, plus de vaisselle, plus de gestion…
Pour 4 personnes en production le matin, c’est chaud et on ne s’ennuie pas ! Viennent s’ajouter 6 personnes pour le service et la vaisselle. On retourne à la base de la cuisine traditionnelle, là ou l’on démontre notre savoir-faire et notre engagement.
Avez-vous une politique de lutte contre le gaspillage alimentaire ? Comment cela se concrétise-t-il au quotidien ?
Malheureusement au collège, c’est le premier moment où l’élève est livré à lui même le temps de la pause méridienne. Avant, au périscolaire, à la maison ou chez la nourrice, ce n’était pas le cas alors il est très difficile de capter son attention. Entre les devoirs, les punitions, les copains, les emplois du temps, etc., le plateau devient superficiel.
Nous faisons des petites formations, invitons les producteurs, faisons des animations, mettons en place des pesées participatives… afin de lutter contre le gaspillage, mais ce n’est pas facile.
Celui qui me dit « Je ne jette rien au Collège », je ne le crois pas où alors je veux bien qu’il me montre ! Je pense sincèrement qu’un quart de la production part en méthanisation à l’issue du repas.
Le menu de vos rêves ?
J’aime plein de choses, je suis gourmand. J’adore travailler simplement les produits pour un goût authentique. Je préfère sincèrement servir d’exemple et qu’on utilise en France plus de produits de nos régions.
Quel produit préférez vous travailler et pourquoi ?
J’adore travailler les produits naturels, poussés en pleine terre, cultivés avec amour et sans produits chimiques. J’ai un penchant pour les recettes traditionnelles revisitées pour la cuisine collective. Le côté visuel à beaucoup d’importance ainsi que les textures.
Faire goûter les élèves est ma mission. Au pire ils n’aiment pas, mais souvent, ils reviennent : j’ai gagné non ?
Je tiens aussi à remercier mon équipe qui oeuvre tous les jours !
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Gérard Baud, votre chef formateur
Cuisinier puis formateur en école hôtelière pendant plus de 30 ans, Gérard Baud anime aujourd’hui des émissions culinaires en France et à l’étranger.
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